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Lettres lusitaniennes
Lettres lusitaniennes
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14 mai 2019

Comment promouvoir la culture de son pays sans être chauvin ?

Chère lectrice, cher lecteur, bonjour,

Lorsque je suis arrivée en France en 2000, afin d’enseigner le portugais dans une université, j’ai fait la connaissance d’un collègue brésilien, installé en France depuis les années 70. Il avait fui la dictature militaire mise en place en 1964, avec son lot de violations des droits de l’Homme, de tortures, d’emprisonnements et d’exécutions arbitraires.

Ce collègue enseignait le portugais (norme du Brésil), la littérature et la culture brésilienne. Il m’a raconté à plusieurs reprises qu’il n’hésitait pas à parler des problèmes du Brésil pendant ses cours de littérature et de culture brésilienne. « Il ne faut surtout pas compter sur moi pour faire de la propagande du tourisme brésilien ni de propager des stéréotypes sur le Brésil ». Malgré les objections de certains collègues, cette approche – que je trouve tout à fait honnête et légitime – ne l’a jamais empêché d’être apprécié par les étudiants - je peux même affirmer qu’il était un des enseignants préférés au sein du département de portugais.

Pourquoi je parle de mon ancien collègue ? Pour dénoncer une certaine approche chauviniste de la promotion de la culture portugaise en France : on porte aux nues l’équipe de foot portugaise, quitte à éveiller des sentiments de haine (j’en sais quelque chose et j’en ai vu des vertes et pas mûres, malheureusement) et on met en évidence le fait que le Portugal soit considéré comme la meilleure destination touristique au monde, quitte à occulter les problèmes relatifs au tourisme de masses qui détruit la qualité de vie dans les grandes villes portugaises.

Pour ma part, je veux bien promouvoir la culture portugaise. En tant qu’enseignante de langue, ce n’est pas difficile : lorsque les étudiants apprennent à commander un repas, il suffit de leur présenter des spécialités gastronomiques portugaises ; lorsqu’ils apprennent à poser des questions sur la meilleure façon de se déplacer en ville, on peut leur présenter les monuments et les musées à visiter ; lorsqu’on parle des saisons et du temps chronologique, quoi de mieux que de parler des fêtes nationales portugaises ? Enfin, quand on parle des habitudes de la vie quotidienne, on peut aussi parler des différences culturelles entre les portugais et les français. Comme quoi, c’est facile, agréable et enrichissant de présenter sa culture.

Pourtant, faut-il pour autant présenter son pays comme le Paradis terrestre et occulter ses problèmes, afin de ne pas « effrayer » nos interlocuteurs, qui risqueraient de se désintéresser du Portugal, surtout dans un contexte où l’enseignement du portugais en France est mis à mal par les politiques successives des différents gouvernements ? Non, non et non. Pourtant, moi aussi, je fais mon mea culpa. Pendant longtemps, moi aussi j’ai propagé des stéréotypes relatifs au Portugal, comme les pastéis de nata (alors qu’on n’a pas que cela), et j’ai donné des conseils de voyage que je regrette amèrement, comme le tram n° 28 à Lisbonne, qui est pris d’assaut par les touristes, au gram dam des riverains. Maintenant, je n’hésite pas à parler de ce qui ne va pas. Je n’hésite pas non plus à dire ce qu’il faut éviter et ne pas faire quand on va au Portugal. On peut – je dirais, ON DOIT – promouvoir la culture de son pays d’une façon responsable.

Ceci dit, ce n’est pas à nous, portugais en général et enseignants de portugais en particulier, de faire la propagande du Portugal en France. On ne nous a jamais payés pour cela. Que l’AICEP et autres institutions portugaises s’en occupent, car c’est leur boulot, pas le nôtre.

CQFD.

Photo prise par l'auteur du blog

Photo présentée par l'auteur du blog

 

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