Chère lectrice, cher lecteur, bonjour,

J'ai vu il y a quelques jours une vidéo qui circule sur Facebook. Il s'agit d'une vidéo d'un humoriste portugais en France (dont je tairai le nom), qui présente sa définition du terme "saudade". Il raconte l'histoire de ses parents, qui ont quitté le Portugal et qui nourissent l'espoir d'y retourner lorsqu'ils seront à la retraite. Il évoque aussi les souvenirs de son enfance, de ses étés au Portugal et les moments heureux qu'il y a vécu et à quel point il a le cœur serré à la fin des vacances lorsqu'il faut rentrer en France. Pour lui, la "saudade" c'est ça.

Tout cela est très joli, mais il s'agit, encore une fois, du discours typique du luso-descendant qui passe ses vacances au Portugal et qui croit que, là-bas, c'est le Paradis. Or, ce monsieur sait-il vraiment ce qui se passe au Portugal? Lit-il les journaux portugais, facilement accessibles en ligne (donc, pas d'excuses pour ne pas être au courant)? Sait-il que la vie là-bas est très dure pour beaucoup de Portugais, qui gagnent un smic de merde et exercent des métiers précaires (car un CDI devient de plus en plus un mirage)? Sait-il ce que c'est de vivre dans les grandes villes, où les loyers deviennent stratosphériques, alors que les salaires stagnent? Sait-il ce que c'est de vivre loin des grandes villes, là où les services publics ferment de plus en plus et les réseaux de transports en commun sont presque inexistants? Franchement, je n'ai pas cette impression lorsque je regarde ses vidéos. Il affiche sa fierté d'être portugais, sa fidélité aux racines familiales (ce qui est très bien), mais il me semble que ce monsieur est carrément à côté de la plaque relativement à la réalité portugaise.

Et puis, s'il est malheureux en France, pourquoi ne s'installe-t-il pas au Portugal pour de bon? Ah oui, sauf que, là-bas, il serait obligé de repartir de zéro car, en termes d'humour, la compétition est rude, et je ne pense pas que ses sketches gentillets (un peu de mordant ne lui ferait pas de mal) auraient du succès là-bas. Ici, il a trouvé son créneau, l'humour communautaire, un humour apprécié parmi les Portugais en France, mais probablement invisible en dehors de la communauté portugaise.

Pour ma part, si le Portugal était le Paradis Terrestre, je ne l'aurais jamais quitté. Jamais. Sauf que non, le Portugal n'est pas le Paradis Terrestre. J'ai beau être fidèle à mes racines, mais je n'oublierai jamais les raisons qui m'ont poussé à quitter le Portugal. Ce sont les mêmes qui ont poussé des centaines et centaines de Portugais à quitter le pays pendant les années 60,70 et aussi pendant les années de crise, entre 2010 et 2013. Le gouvernement actuel essaie tant bien que mal d'attirer les Portugais partis à l'étranger, mais ce n'est pas une prime de 6000 euros qui nous fera changer d'avis. Nous avons construit nos vies dans nos pays d'accueil, où nous percevons de meilleurs salaires. Il y a de beaux paysages et le climat est tendanciellement plus doux au Portugal (quoique...), mais, contrairement à ce que dit la fameuse chanson d'Aznavour, la misère n'est pas plus douce au soleil. Non, on n'est pas dans le monde de Oui-Oui au pays des jouets.

Voici donc un message adressé aux luso-descendants qui, comme lui, croient que le Portugal est le Paradis : si vous êtes vraiment patriotes, si vous aimez vraiment le pays de vos parents et grands-parents, alors faites l'effort de vous intéresser vraiment à ce qui se passe là-bas, au lieu d'afficher votre patriotisme de pacotille.

C'est la moindre des choses.

Image par OpenClipart-Vectors sur Pixabay

Oui-Oui au pays des jouets

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