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Lettres lusitaniennes
Lettres lusitaniennes
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8 février 2021

L'assimilation? Non, merci!

Chère lectrice, cher lecteur, bonjour,

J'ai lu récemment un article dans Marianne, qui vantait les mérites de l'assimilation à la française. Je n'ai pas résisté et j'ai envoyé un courriel afin d'exprimer mon point de vue.

Le voici :

Bonsoir,

Après avoir lu votre article « Assimilation, retour en grâce » (Marianne n° 1245), je vous écris afin d’apporter mon grain de sel.

Votre article fait l’éloge de l’assimilation des immigrés en France. Selon vous, s’assimiler, ce n’est pas s’oublier. Or, je veux justement vous prouver le contraire.

Premièrement, savez-vous ce qu’est l’assimilation ? Vous vous êtes déjà rendu compte de la connotation coloniale de ce mot ? Dans les sociétés coloniales, il y avait trois catégories de populations : les blancs, qui étaient privilégiés par rapport aux autres populations indépendamment de leur condition sociale, puisqu’ils jouissaient de tous les droits civiques ; les « indigènes », forcément infréquentables… et, au milieu, les « assimilés », les « natifs » ayant adopté les us et coutumes des colonisateurs, quitte à changer de nom, se coupant ainsi de leurs racines.

En France, cela n’a été guère mieux : l’assimilation à la française a provoqué un véritable génocide culturel et identitaire en engendrant des générations de descendants d’immigrés devenus de « bons petits français », coupés de leurs racines, ignorant tout de la culture de leurs ancêtres et ne parlant que le français, puisque les instituteurs leur ont dit que le bilinguisme, ce n’était pas bien, alors que le bilinguisme est une richesse, pas une tare. Bref, tout le contraire de votre propos, selon lequel s’assimiler, ce n’est pas s’oublier.

De plus, vous citez un jeune essayiste, Raphaël Doan, qui présente l’anéantissement des langues régionales au début du XXème siècle grâce à l’Éducation nationale comme un exemple à suivre. Comment pouvez-vous comparer le début du XXème siècle avec le nôtre, alors qu’il n’y avait ni la télévision, ni la radio, ni internet et les journaux étaient inaccessibles à la plupart des citoyens français ? Croyez-vous que le multilinguisme est une menace à l’unité nationale, alors que la France n’a jamais été un pays monolingue ?

Dites-moi, franchement : les langues et les cultures des immigrés vous font peur ?  Est-on vraiment obligé de manger français, s’habiller français, parler exclusivement le français, ne regarder que la télévision française qui, sauf quelques rares exceptions, est une télévision de merde ? Et faut-il aimer certains artistes sous peine d’être taxé de « mauvais français », comme l’a fait Alain Finkielkraut lorsqu’il a critiqué l’absence des jeunes des banlieues à l’enterrement de Johnny Hallyday, idole des jeunes, mais surtout un piètre chanteur et un mauvais citoyen ?

Moi, immigrée et « française de papier » (une étiquette fabriquée par l’extrême-droite adressée aux immigrés naturalisés comme moi), je dis non à l’assimilation. Pourquoi ? Parce que, avant de vivre en France et de devenir une citoyenne française, j’ai vécu une autre vie, j’ai ma culture, mon identité et ma langue. Ne comptez pas sur moi pour les gommer afin de faire plaisir aux assimilationnistes de tout poil comme vous-mêmes, Manuel Valls, Éric Zemmour, Nadine Morano ou Lionnel Luca.

Ce dont les immigrés ont besoin c’est, d’abord, parler français (c’est la moindre des choses) et connaître et adhérer à ce que vous appelez les « valeurs républicaines », pas qu’on leur dise comment vivre leur vie quotidienne.

Merci.

 

Image par OpenClipart-Vectors sur Pixabay

Image par OpenClipart-Vectors sur Pixabay

 

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